L’objectif de la présente note est d’exposer les innovations majeures introduites dans le cadre de la réforme du cadre juridique régissant les PPP au Sénégal. Il s’agit notamment de :
1. La mise en place d’un cadre juridique unifié et simplifié des PPP
Le cadre juridique est simplifié. Les différentes formes contractuelles de partenariat public-privé sont réduites à deux, à savoir les PPP à paiement par les usagers et les PPP à paiement public.
Par ailleurs, la mise en place d’un cadre unifié évite aux acteurs la contrainte de déterminer en amont la nature du contrat pour connaître la procédure de passation à suivre. Cette flexibilité de délier la procédure de passation de la forme contractuelle de PPP permet de mettre en place le schéma de contractualisation le mieux approprié et donc d’avoir une stratégie globale sur le développement des PPP comme instrument complémentaire au marché public pour mieux répondre aux besoins, notamment en infrastructures.
2. La rationalisation du cadre institutionnel
La rationalisation se traduit par un renforcement des organes compétents en matière de marchés publics, la création d’un organe expert et d’un comité interministériel, tout en permettant de rendre plus opérationnel et plus crédible le cadre des PPP avec des instances ayant une expertise reconnue.
Ainsi, le nouveau cadre institutionnel est articulé autour des quatre (4) organes suivants :
l’Unité nationale d’Appui aux PPP (UNAPPP), l’organe expert chargé de rendre un avis consultatif sur les évaluations préalables des projets PPP et de fournir un appui technique, juridique et financier aux autorités contractantes dans l’identification, la préparation, la structuration, la négociation et le suivi des projets PPP. L’UNAPPP est une structure avec une organisation et un fonctionnement flexibles, capable de réagir avec célérité et succès sur des projets complexes ;
la Direction centrale des marchés publics (DCMP), organe chargé du contrôle de conformité des procédures de passation des contrats de partenariat public-privé, la revue technique et juridique des projets étant désormais confiée à l’UNAPPP ;
l’Autorité de Régulation de la Commande publique (ARCOP), à qui est dévolu le rôle de régulation des contrats de PPP. Elle est l’organe chargée de la régulation du processus de passation des contrats de partenariat public-privé ainsi que du règlement des différends nés de leur passation ;
le Comité interministériel, organe de décision et d’orientation stratégique pour la mise en œuvre des contrats de Partenariat public-privé, chargé de statuer sur l’opportunité de lancer les procédures de passation des contrats de PPP et sur les dérogations, notamment le recours à la procédure d’entente directe. Ce Comité est composé du Ministre des Finances et du Budget, du Ministre de l’Economie, du Plan et de la Coopération, du Ministre Secrétaire Général de la Présidence de la République et du Ministre concerné par le projet ou son représentant. Le Secrétariat du Comité interministériel est assuré par le Coordonnateur de l’UNAPPP.
3. La généralisation de l’évaluation préalable à tous les projets PPP
L’évaluation préalable obligatoire est en effet étendue à l’ensemble des contrats PPP afin de s’assurer que les projets délivrés soient des projets de qualité et répondent à des besoins d’intérêt général bien identifiés. La pratique des projets complexes montre également que c’est un facteur de gain de temps important dans la réalisation des projets.
Elle est réalisée par l’autorité contractante et soumise à l’avis consultatif de l’Unité nationale d’appui aux PPP (UNAPPP). Dans le cadre de sa contre-expertise sur l’évaluation préalable, l’UNAPPP doit solliciter l’avis conforme du Ministre chargé des Finances sur la soutenabilité budgétaire et l’avis conforme du Ministre chargé de l’Aménagement du territoire pour s’assurer de la conformité du projet PPP au Plan national d’Aménagement du territoire et de développement durable.
4. Des procédures de passation clarifiées et encadrées
Les procédures de passation des contrats PPP sont clarifiées et encadrées, à travers notamment des délais précis et des missions bien définies pour chaque organe intervenant dans le cycle du projet PPP. Par ailleurs, la loi prévoit un éventail riche de procédures de passation pour s’adapter aux différents besoins des autorités contractantes.
Les autorités contractantes peuvent mettre en œuvre les types de procédures de passation ci-dessous :
- a) soit l’une des procédures de droit commun suivantes : la procédure d’appel d’offres ouvert en une étape, précédée ou non d’une pré-qualification; la procédure d’appel d’offres ouvert en deux étapes, précédée d’une pré-qualification.
- b) soit l’une des procédures dérogatoires suivantes :
- (i) la procédure d’appel d’offres restreint ;
- (ii) la procédure d’appel d’offres avec concours ;
- (iii) la procédure de dialogue compétitif ;
- (iv) la procédure d’entente directe.
5. Un dispositif de promotion du secteur privé local renforcé
La loi PPP 2021 a introduit un certain nombre de dispositions spécifiques destinées à promouvoir l’implication du secteur privé national et communautaire dans les projets PPP.
Les projets de contrat de partenariat public-privé dont la valeur globale estimée hors taxes est inférieure à un seuil fixé par décret sont réservés aux entreprises nationales et communautaires.
Au plus tard dans un délai de trois (3) mois à compter de la signature du contrat de partenariat public-privé, le titulaire doit constituer une société de droit sénégalais dédiée à la mise en œuvre du projet.
Une part de 33% de l’actionnariat est réservée aux opérateurs économiques nationaux. Contrairement à la loi de 2014 où la part réservée était de 20 %. Il y a ainsi une hausse de 13% pour les PPP à paiement public et de 33% pour les PPP à paiement par les usagers (DSP) dans la mesure où il n’y avait pas d’actionnariat réservé aux opérateurs économiques nationaux pour les DSP.
Par ailleurs, les modalités d’acquisition des parts concernées par le secteur privé national sont précisées dans le décret.
Les autorités contractantes peuvent prévoir, parmi les critères d'attribution énoncés dans le dossier d'appel d'offres, des exigences liées au contenu local du projet PPP, notamment :
les initiatives relatives à l'emploi et à la formation professionnelle ;
les initiatives pour l'intégration des artisans et des petites et moyennes entreprises ;
les actions et propositions concrètes en matière de développement durable.
L’objectif est de contribuer au développement du tissu industriel local et des compétences nationales pour leur permettre de participer aux activités industrielles dans les secteurs de développement du pays.
- Projets réservés au secteur privé local
- Mise en place obligatoire d’une société de droit sénégalais pour la mise en œuvre du projet
- Actionnariat réservé aux nationaux dans les sociétés de projet
- Exigences de contenu local
- Sous-traitance
- Les opérations de sous-traitance doivent être prioritairement réservées aux entreprises nationales ou communautaires. C’est uniquement dans le cas où les d’entreprises locales ne sont pas en mesure de réaliser les missions proposées dans des conditions techniques satisfaisantes que l’opérateur peut sous-traiter aux entreprises extra-communautaires.
6. Mise en place d’outils facilitant la réalisation rapide de projets de qualité
Un certain nombre d’instruments ont été introduits par la nouvelle loi afin de faciliter le développement substantiel de PPP de qualité. Il s’agit notamment :
Il est créé un fonds d’appui aux partenariats public-privé destiné aux autorités contractantes et visant notamment à financer la préparation, la passation et l’exécution des projets de contrats de partenariat public-privé.
L’accord-programme constitue un outil efficace au service des collectivités territoriales en leur permettant de se retrouver en intercommunalité pour regrouper dans le cadre d’un seul contrat la réalisation de plusieurs projets similaires de moindre envergure.
En effet, c’est un contrat par lequel l’autorité contractante présélectionne un ou plusieurs opérateurs économiques en vue de conclure des contrats PPP parmi le ou les titulaires de l’accord, pendant une période donnée, au fur et à mesure de ses besoins et pour des prestations déterminées.
La loi permet aux autorités contractantes de recourir à des procédures dématérialisées qui permettront de raccourcir de manière significative les délais et rationaliser les coûts liés aux procédures d’appels d’offres.
- du Fonds d’appui aux partenariats public-privé
- Des accords-programmes
- Des procédures dématérialisées
7. Un dispositif renforcé de suivi et de contrôle de l’exécution des contrats PPP
Un dispositif de suivi et de contrôle renforcé est mis en place afin d’organiser et d’encadrer le contrôle et le suivi de l’exécution des PPP par les autorités contractantes avec l’appui de l’organe expert (UNAPPP). Les autorités contractantes devront constituer un Comité de suivi pour chaque projet PPP.
8. Règlement des différends
En ce qui concerne le règlement des différends, un dispositif permettant de dissuader les recours dilatoires tout en garantissant l’effectivité́ des recours non-juridictionnels et juridictionnels est mis en place. Par ailleurs, il est également mis en place une procédure de conciliation préalable obligatoire avant tout recours à une instance judiciaire ou arbitrale.